Intervention précoce dans les schizophrénies et psychoses émergentes

Délire, hallucinations
Le soin est urgent

Au cours des années 1990, en Australie, un mouvement a été lancé  par l’équipe du Dr Patrick Mc Gorry. Son programme EPPIC est maintenant considéré comme pionnier. Il est mis en œuvre dans de nombreux pays.

L’intervention précoce dans les schizophrénies débutantes, ou « psychoses émergentes »peut-elle améliorer, par la mise en place d’un dispositif complet de suivi, l’évolution des troubles à long terme ?

Dans les états schizophréniques, le début de troubles est souvent insidieux et peu repérable par les proches

  • dans le cours d’une période de prodromes (signes de début) d’une durée de 2 à 5 ans
  • apparaissent des modifications discrètes du fonctionnement psychique
  • troubles du comportement psychosocial, affectif, relationnel et cognitif, idées délirantes
  • mais ce sont des signes qui n’atteignent pas le seuil d’intensité permettant de poser un diagnostic sûr

Aussi, sans traitement, des symptômes psychotiques francs risquent d’apparaitre :

  • les troubles sont manifestes (propos délirants, hallucinations, troubles de la pensée, incohérence des propos et des conduites, désorganisation psychique..)
  • dépression psychotique sévère, tentatives de suicide, psychose hallucinatoire envahissante, symptômes négatifs, bizarreries, « position autistique »..

Après traitement du premier épisode, parfois compris comme une bouffée délirante, les risques de rechute sont très importants

Ainsi, on considère que 50 % des patients présentent un nouvel épisode psychotique dans les 2 ans.

Mais quand les crises psychiques se succèdent, les conséquences familiales, sociales, scolaires et professionnelles deviennent importantes avec, à l’âge adulte, un progressif retrait de la réalité et souvent un recours à une consommation de cannabis.

C’est pourquoi, la Durée de Psychose Non Traitée est un élément crucial dans le pronostic des schizophrénies et psychoses émergentes

Ainsi, plus le patient est resté longtemps sans soins plus l’évolution ultérieure de la maladie serait défavorable. En effet, l’importance de cette phase vient du fait que les troubles intellectuels (cognitifs) que l’on observe à la phase avancée de la schizophrénie se développent surtout dans cette période initiale.

De plus, selon le Dr Philippe Conus, à Lausanne, ces patients ont en commun des difficultés très importantes :

  • à prendre conscience de leurs troubles
  • et par conséquent à comprendre la nécessité de s’engager durablement dans les soins

Ainsi, il est capital de prévenir les rechutes après le premier épisode psychotique pour ne pas laisser se produire une dégradation à long terme.

De fait, pendant la  « période critique » de 3 à 5 ans après le début de la maladie, on doit organiser des soins strictement adaptés à chaque cas :

  • très rapidement : des programmes psychothérapiques et éducatifs spécifiquement adaptés à ces troubles
  • souvent, il faudra prescrire des doses faibles d’antipsychotiques (ou neuroleptiques), parfois d’antidépresseur
  • la famille sera reçue, aidée et suivie
  • ce dispositif pourrait permettre d’infléchir le risque d’évolution défavorable et d’aller vers le rétablissement
  • le patient correctement encadré et suivi voit augmenter ses chances d’échapper à un parcours vers une invalidité sociale et psychologique

L’intervention précoce dans les schizophrénies et psychoses émergentes se pratique dans de nombreux pays, Australie, Canada, Allemagne, Royaume Uni.

En France, plusieurs expériences sont à maturité

  1. le C’JAAD à l’Hôpital Ste Anne (Pr M.O. Krebs)
  2. PREPSY à Paris 13è (Dr Guy Gozlan)
  3. le CIPP à Dijon (Dr Juliette Martin)
  4. l’EIPP à Clermont-Ferrand
  5. le CLIP à Nancy (Pr Laprevote)
  6. le TIPP à Caen (Dr L. Alameda)

Prépsycontact met à disposition sur sa page d’accueil une carte de France les structures de soins

les plus proches du domicile : Centres médico-psychologiques (CMP) – Consultations Jeunes Consommateurs (CJC) – Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS) ainsi qu’un numéro d’orientation (0140790838). Cette plate-forme vise à favoriser des liens durable entre les différents partenaires : psychiatre libéral ou hospitalier, médecin traitant, psychologue, psychothérapeute, assistant social, service administratif, institution scolaire, services d’addictologie … afin de favoriser un accompagnement personnalisé et rapide.

Prépsy est aussi un Samsah pour les patients de 18 à 25 ans d’Ile de France, avec reconnaissance MDPH.

Par ailleurs, on annonce une appli de guidance de l’accompagnement thérapeutique de ces patients est à l’étude : Plan-e-Psy

Pour mieux comprendre voir  : Angoisse, troubles psychotiques et schizophrénie

Bibliographie

Conus P., Polari A., Bonsack C., Intervention dans la phase précoce des troubles psychotiques : objectifs et organisation du programme TIPP (Traitement et intervention dans la phase précoce des troubles psychotiques) à Lausanne, in L’Information Psychiatrique 2010/2, Vol 86, p145à 151

Iyer, S. N. Malla, A. K. (2014), Intervention précoce pour la psychose : concepts, connaissances actuelles et orientations futures, Santé Mentale au Québec, 39, 201 – 229

Pr  P. Mc Gorry (Melbourne): programme EPPIC

Cette problématique et les solutions en cours ont été évoquées par plusieurs intervenants lors de la Semaine de l’Information Psychiatrique à Antibes en octobre 2018.  Interventions du Dr Ph. Conus, du Pr M.O. Krebs, du Dr Chambry.  L’information psychiatrique 2009/5 (Volume 85), coordonné par le Dr Suzanne Parizot

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